mardi 6 février 2024

Monsieur le Député : Non ! L’enseignement privé ce n’est pas le service public



Cet article traite un sujet dont il apparaît qu'il ne serait plus d'actualité, remplacé dans les médias par les manifestations d'agriculteurs. Or, la question de la place l'enseignement privé en France semble impérissable. Elle peut donc être traitée indépendamment voire à distance des faits qui marquent cette question. N'étant pas journaliste je peux ne pas respecter l'urgence de la description d'un fait, pour, au contraire, le confronter à l'analyse et à la réflexion.

  

Dimanche 14 janvier 2024, le président de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, le député MODEM Jean-Louis Bourlanges, était l'invité du “8h30 franceinfo”.  Interrogé sur les déclarations de la ministre de l’Éducation nationale au sujet de la scolarisation de ses enfants dans un établissement scolaire privé, Jean-Louis Bourlanges déclarait que les enfants de la ministre « Sont élevés dans le service public car je rappelle que les établissements sous contrat font partie du service public. »

Monsieur le député a commis deux erreurs dans sa réponse. Première erreur : les écoles, qu’elles soient publiques ou privées, n’ont pas la charge d’élever les enfants mais seulement celle de leur apporter un enseignement académique joint à un enseignement « civique », deuxième erreur : les établissements privés ne font pas partie du service public.

Je ne traiterai que de la seconde erreur, la première alimentant un débat de philosophie de l’éducation ouvert au XVIIIe siècle qui n’est toujours pas vraiment clos.

 

Monsieur le député se trompe lorsqu’il affirme que les établissements scolaires privés sous contrat font partie du service public. En France, l’enseignement privé participe au service public de l’éducation nationale aux côtés de l’enseignement public. L’enseignement privé participe mais il n’est pas le service public. Sabine Monchambert[1] donne, dès l’introduction de son livre, une très bonne image de la situation de cohabitation entre l’enseignement public et l’enseignement privé : « L’État français, à côté de l’enseignement public dont il a la responsabilité (Préambule de la Constitution de 1946) reconnaît l’existence d’un secteur privé. Après deux siècles de débats, la liberté d’enseignement est aujourd’hui une liberté publique fondamentale dont la valeur constitutionnelle a été réaffirmée à deux reprises par le Conseil constitutionnel dans ses décisions du 28 novembre 1977 et du 18 janvier 1985. »

Pour comprendre cette situation il faut remonter à la Révolution qui reconnaissant le droit à l’instruction pour tous créait des obligations pour l’État en matière d’organisation de service public d’enseignement. Ainsi, cité par Sabine Monchambert, Talleyrand rappelait en 1791 devant l’Assemblée Constituante : « Il sera libre à tous particuliers, en se soumettant aux lois générales de l’enseignement public, de former des établissements d’instruction ; ils seront seulement tenus d’en instruire la municipalité et de publier le règlement. » Entre l’intention de l’enseignement public évoquée par Talleyrand et la création du service public d’enseignement voulu par Jules Ferry il s’est écrit une histoire longue et complexe dont je relate[2], par exemple, les péripéties dans mon ouvrage relatif aux écoles dans une petite ville de l’Isère : Tullins-Fures-Fures. Ainsi, on peut voir que l’éducation des enfants était, depuis longtemps, une préoccupation pour les édiles de la ville puisque les délibérations de la communauté font apparaître en 1601 que « le sieur Ennemond Damoure est élu pour remplir les fonctions de précepteur de la jeunesse avec jouissance des revenus et pensions légués en faveur de ceux qui instruisent la jeunesse, ainsi que des exemptions attachées auxdites fonctions. Le sieur Étienne Cheval fait offre de partie de sa maison pour le logement dudit précepteur ». Les archives montrent que la communauté prenait en charge l’école y compris sur le plan de son installation matérielle : « location (en 1655) par la communauté d’une maison aux dames Ursulines de Tullins-Fures destinée à l’école pour avoir un local plus spacieux et plus commode ». La période « révolutionnaire » confirme cet engagement pour une école « publique » puisque le Conseil Général de la commune accepta de charger en mai 1793 Charles Caziot de la mission de l’instruction publique : « Considérant que le citoyen Caziot a donné en cette ville (Montbrison) des preuves de ses talents pour l’éducation de la jeunesse, que depuis il a toujours fait les fonctions de précepteur à Montbrison à la satisfaction des habitants de cette ville, a arrêté qu’il [le Conseil Général de la commune] verra venir avec plaisir se fixer ici, et en sa faveur provisoirement une gratification annuelle de 150 livres à compter du jour qu’il commencera son instruction publique ».

En France l’École va aller, entre initiative privée et volonté publique, de loi en loi, jusqu’à la création de l’École que nous connaissons aujourd’hui. Déjà en décembre 1792 loi Lanthenas qui prévoyait une école primaire dans tous les lieux entre 400 et 1500 habitants et que les instituteurs, déclarés fonctionnaires publics, reçoivent une rémunération minimum de 1200 livres et soient logés par la commune. Cette loi n’a été appliquée en raison du manque de moyens financiers des communes qui se sont souvent tournées vers l’enseignement privé en lui déléguant cette charge comme peut l’illustrer cette délibération de 1818 où le conseil municipal de Tullins-Fures qui rapportait une requête des Dames Ursulines dans laquelle elles demandaient à s’installer à Tullins-Fures : « Le conseil ayant délibéré de l’utilité de l’établissement d’une communauté de Dames Ursulines et sur les avantages qu’il procurera à la commune. Considérant qu’il y avait avant la Révolution une semblable communauté à Tullins-Fures, qu’elle faisait du bien, soit par un enseignement gratuit pour les jeunes filles dont les parents étaient dépourvus de moyens, soit en admettant dans la maison de jeunes pensionnaires qui y recevaient les meilleurs principes et de l’instruction, soit par les charités qu’elles distribuaient à la classe indigente. Considérant que le rétablissement d’une pareille communauté donnerait à la commune dont la population a près de 4000 âmes et aux autres communes assez considérables dont elle est avoisinée, l’espoir de voir renouveler les bienfaits sus analysés… ». Puis ce fut, comme loi majeure, la Loi Guizot de 1833 qui obligeait les communes à être propriétaires d’une « maison d’école » au bénéfice de l’enseignement primaire. On peut voir là le début de l’organisation d’un service public national d’éducation. La loi Guizot en organisant l’école publique ne remettait pas en cause l’enseignement privé tout en le soumettant à des conditions strictes : déclaration d’ouverture de l’école, respect des conditions de salubrité, preuve de la capacité des personnels à enseigner. Toutefois, cette loi portait en germe la querelle entre « public » et « privé ». Puis ce fut la Loi Falloux en 1850 qui complétait la loi Guizot en rendant obligatoire une école de garçons dans toute commune de 500 habitants ainsi que la création d'une école de filles dans toute commune de 800 habitants ; la loi simplifie les conditions requises pour l’ouverture et le fonctionnement des écoles privées et ouvre le dispositif aux établissements d’enseignement secondaire. Ainsi, après les lois Guizot et Falloux le système scolaire, en France, comprenait deux sous-systèmes : l’enseignement public avec les écoles communales gérées par les communes et le collège géré par le département, et l’enseignement privé de congréganiste ou laïque.

La petite ville de Tullins-Fures, évoquée plus haut, mit en œuvre la loi comme l’indique la délibération du conseil municipal du 15 mars 1835 relative à « l’organisation de l’école primaire communale ». Ainsi on y trouve : « Il [le maire] a invité le conseil municipal à délibérer : sur la création d’une école primaire, élémentaire et communale, sur le choix du sujet à présenter pour être nommé instituteur communal… » Le 6 septembre 1832 la commune avait accédé à la demande du premier vicaire, Barbier, d’ouvrir un collège pour enseigner la grammaire française, grecque et latine, dans la maison de Monsieur Triolle. D’autre part plus de 150 enfants pauvres ne recevaient aucune instruction (conseil municipal du 12 décembre 1849). Aussi, le conseil municipal « considérant que les charges que la commune devra s’imposer pour ladite école seront compensées par l’instruction qui pourra être donnée à tous les enfants de familles indigentes » (conseil municipal du 11 novembre 1848). C’est donc avec empressement que la commune accepta plusieurs legs en 1848 et en 1849 pour que soit créée une école des Frères des Écoles Chrétiennes. Le 19 février 1852, Monsieur Garnier en fonction depuis 1850, prenait officiellement la direction de l’école des Frères des Écoles Chrétiennes à Tullins-Fures ; il était aidé par quatre frères rétribués par la commune. Ainsi, à Tullins-Fures l'existence de l'école communale laïque n'empêcha en rien la municipalité d'autoriser, voire de favoriser, la création d'une école congréganiste tenue par les Frères des Écoles Chrétiennes en 1850 comme le montre la délibération du conseil municipal du 12 décembre 1849 à l'occasion de l'acceptation d'un legs en faveur de l'établissement d'une telle école : « Considérant que depuis plusieurs années la commune s'occupe du projet d'élever une école des frères de la doctrine chrétienne, que cet établissement dont l'utilité a déjà été reconnue par le Conseil actuel et par les administrations antérieures, n'a été retardé jusqu'à ce jour que par le défaut de ressources suffisantes pour cet objet ». À l'aube des lois Jules Ferry, la cité offrait au bourg de Tullins-Fures une école des Frères des Écoles Chrétiennes, une école laïque communale, une école libre laïque de garçons, une école de filles et une salle d'asile, et, au hameau de Fures, une école libre de garçons, une école libre de filles et une salle d'asile qui permettaient à 98,5% des enfants de 6 à 13 ans de fréquenter l'école.

Cette première cohabitation en l’enseignement public et l’enseignement privé voit son harmonie fortement remise en question par la loi Combes du 7 juillet 1904 qui interdit l’enseignement aux congrégations ; relevons que cette loi ne faisait pas l’unanimité notamment au sein du camp des Républicains[3]. Comme l’indique Sabine Monchambert[4] « La république radicale du début de ce siècle (XXe siècle) porte directement atteinte à l’enseignement privé avec les lois de 1901 et de 1904 interdisant les congrégations. » Il faut attendre la fin de la Première Guerre mondiale pour voir le principe de la liberté d’enseignement s’ouvrir à nouveau à un ensemble de partenaires notamment lorsqu’il s’applique au bénéfice d’autres secteurs que l’enseignement classique. L’organisation de l’enseignement technique, en 1919, créait un régime original ou la concertation entre le secteur public et le secteur privé peut être considérée comme une préfiguration du système contractuel qui sera mis en place par la loi Debré de 1959. Le régime juridique de l’enseignement privé prend alors, petit à petit, la forme qu’on lui connaît aujourd’hui grâce à une succession de textes législatifs et réglementaires comme, sous la IVe République, la Loi Marie qui, en 1951, admettait les élèves de l’enseignement privé au bénéfice des bourses d’enseignement général, la Loi Baranger qui autorisait les écoles privées à percevoir l’allocation scolaire voulue pour aider les communes à gérer leurs écoles, la Loi Baranger prévoit une allocation trimestrielle pour chaque enfant fréquentant l’école primaire publique ou privée. Pour le public, l’allocation sera versée à la Caisse départementale scolaire (relevant du Conseil Général) qui assure la répartition des fonds et pour le privé, aux associations de parents d’élèves.

Le principe de la liberté d’enseignement voulu par les Révolutionnaires de 1789 a donné lieu au fil du temps, en allant au-delà de la reconnaissance du pluralisme scolaire, à un système de cohabitation entre un secteur d’enseignement gérer par le « privé », le plus souvent religieux mais pas exclusivement, et un secteur géré par « le public ». Le seul accroc que l’on peut relever c’est celui, en 1904, de l’interdiction d’enseignement opposé aux congrégations religieuses, mais il faut noter que d’autres établissements « non religieux » pouvaient continuer à fonctionner. La loi Debré du 31 décembre 1959 a renforcé le principe de la liberté d’enseignement « en faisant appel, par souci de justice sociale, à l’idée de liberté concrète, il a défini les modalités de collaboration de tous les enseignants, dans le respect de leur mission propre, à un même service d’enseignement dans le cadre d’un système souple et gradué : indépendance, contrat et intégration. Un troisième secteur d’enseignement naît ainsi : l’enseignement privé sous contrat, associé à la mission de service public[5]. » Sont alors mis au point deux types de contrats : les contrats simples et les contrats d’association, qui permettent aux établissements privés de bénéficier d’une aide financière de l’État et des collectivités locales (communes, conseil départemental, région) tout en gardant une large part d’autonomie et leur caractère propre. Sont ainsi pris en charge la rémunération des enseignants du privé et une partie des frais de fonctionnement. Ce système d’association a été confirmé par le Conseil constitutionnel en 1985 éteignant ainsi la volonté du président François Mitterrand (proposition numéro 90 de son programme électoral) de créer « Un seul grand service public unifié et laïque de l’Éducation nationale ».

 

On voit à travers cette synthèse historique   illustrée par l’exemple de l’évolution de l’école  dans la petite ville Tullins-Fures  en Isère  comment l’enseignement privé a pu se positionner  comme  supplétif d’un système public défaillant parce que difficile à mettre en place pour des raisons financières notamment  après la Loi Guizot  ou  insuffisant pour répondre à la demande  au regard de la poussée démographique comme l’indique Jean-Paul Durand[6] « Devant la croissance démographique après la Seconde Guerre mondiale, l’État a pu calculer qu’en obtenant le concours d’écoles libres, cela lui coûterait moins cher que de faire porter cette charge par un surcroît d’effort de la part de l’enseignement public. » C’est dans ce contexte que la Loi Marie et La loi Baranger virent le jour, et c’est à cette situation de difficultés pour l’enseignement public que voulait répondre la loi Debré de 1959. Cette loi issue de la commission Lapie « refuse un système d’enseignement concurrent [au service public de l’éducation nationale], la reconnaissance d’un corps intermédiaire bénéficiant en tant que tel de prérogatives pour assurer mission de service public[7]. » Dès lors l’enseignement privé perd son statut de supplétif du service public pour devenir, par contrat, un auxiliaire reconnu du service public dans un esprit de partenariat et de coopération qui, tout en gardant son caractère propre, est soumis à un certain nombre de règles et de contrôles de la part de l’État.

 

Depuis la loi Debré, l’État ne coopère pas avec l’enseignement privé pris comme un ensemble d’établissements unifiés, mais il travaille avec chacun des établissements privés pris individuellement qui se lie avec l’État dans un contrat. C’est effectivement à chacun des établissements, individuellement, de solliciter de bénéficier du régime contractuel. Il est alors proposé aux établissements le choix entre le contrat d’association et le contrat simple. Par le contrat d’association l’établissement marque sa volonté de s’associer aux missions de service public qui incombe à l’État, le contrat simple est une forme plus souple de coopération entre l’établissement et l’État. Notons au passage que les établissements privés d’enseignement supérieur et les établissements accueillant des enfants en situation de handicap sont exclus de ce type de contrats ; cependant ces derniers dépendant du ministère de la Santé peuvent bénéficier du contrat simple.

 

Il faut cinq ans de fonctionnement à un établissement d’enseignement avant de pouvoir solliciter de passer un contrat avec l’État. Le site du Ministère de l’Éducation nationale indique : « Ce contrat oblige l’établissement à accueillir les enfants sans distinction d’origine, d’opinion ou de croyance. En contrepartie, l’État rémunère les enseignants, et les collectivités publiques doivent financer le fonctionnement de l’établissement dans les mêmes proportions qu’elles financent les établissements d'enseignement public. Toutefois, quand il s’agit d’un contrat simple, les communes n'ont pas l'obligation de participer au financement. Bien évidemment l'État se doit de contrôler les établissements avec lesquels il contracte comme d’ailleurs il contrôle ses propres établissements, en outre l’État ne signe un contrat qu’après que le Recteur ait reconnu l’existence d’un besoin scolaire[8]. Une fois le contrat conclu, après une longue procédure, tous les établissements privés sont soumis à des inspections, ce qui ne les empêche pas de conserver leur caractère propre. Ce contrôle se fait sous la double autorité du préfet et du recteur ; il s’agit de contrôles administratifs qui s’assurent que le directeur et les enseignants disposent des diplômes requis et que sont respectées les dispositions juridiques relatives à l’obligation scolaire, l’ordre public, la prévention sanitaire et sociale et à la protection de l’enfance et de la jeunesse ; la Loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a créé une procédure de fermeture administrative par le préfet et élargi le champ du contrôle exercé sur ces établissements (contrôle de l'origine du financement à tout moment et de l'honorabilité de l'ensemble des personnels). Le recteur, quant à lui, à la compétence du contrôle pédagogique par lequel il s’assure que l’enseignement se conforme aux droits garantis par les traités et par la Constitution ; il s’agit alors de vérifier que le droit à l’éducation qui permet à chaque enfant de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, d’exercer sa citoyenneté[9], est effectivement mis en œuvre. Les établissements signataires du contrat s’engagent à ce que les élèves qui lui sont confiées acquièrent les instruments fondamentaux du savoir, des connaissances de base[10], et pour ce qui concerne l’enseignement professionnel et technique que les élèves reçoivent la formation adéquate. D’autre part l’établissement s’engage à ce que les élèves reçoivent une éducation leur permettant « de développer son sens moral et son esprit critique, de partager les valeurs de la République[11] ». L’inspection des enseignants des établissements sous contrat par les inspecteurs de l’éducation nationale dans les mêmes conditions qu’elle s’effectue pour les enseignants « publics » est une manière de garantir que l’enseignement donné dans un établissement sous contrat est conforme aux attentes édictées par le code de l’éducation. Là apparaît une ambiguïté liée au statut des enseignants, sans doute à l’origine de l’erreur de monsieur le député Bourlanges. La loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005, dite "loi Censi" a octroyé aux maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat un statut d’agents de droit public qui leur est spécifique. Ils sont régis par un contrat de droit public et sont donc des agents de l’État. Ils sont nommés par le recteur. Leur carrière est régie par des textes réglementaires tels que définit dans le Code de l’Éducation mais leur salaire est inférieur, en moyenne de 12%, à celui des enseignants « publics ». Autre particularité, dans l’enseignement public, l’enseignant titulaire est rémunéré à temps complet même en cas de sous-service alors que dans l’enseignement privé s’il est forcé d’effectuer un service incomplet faute d’un nombre d’heures suffisant, il est rémunéré au prorata du nombre d’heures effectives. Mais, en tant qu’enseignant dans un établissement privé sous contrat d’association, ces maîtres relèvent également de l’autorité du chef d’établissement. D’autre part le chef d’établissement peut « choisir » les enseignants qu’il recrute alors que dans le « public » la nomination d’un enseignant propos s’impose au chef d’établissement.  La réglementation indique précisément que le chef d'établissement privé exerce sa responsabilité de constitution de l'équipe enseignante.

 

Ces rappels juridiques et administratifs montrent que l’enseignement privé ne jouit que d’une liberté restreinte très encadrée par les termes du contrat. Pour autant, comme il est dit plus haut, ces établissements gardent leur caractère propre garanti par l’article L442-1 du code de l’éducation. La notion de caractère propre est assez complexe à définir ; un caractère propre qui peut être confessionnel, c’est-à-dire relevant de la tutelle « canonique » d’un culte. C’est pour satisfaire aux conditions de fonctionnement de ce caractère propre que le chef d’établissement peut « choisir ses enseignants ». Jean-Paul Durand[12] dessine la notion de caractère propre ainsi : « Un caractère propre qui peut être confessionnel, c’est-à-dire relevant de la tutelle « canonique » d’un culte. Mais d’autres caractères propres existent ; par exemple ils relèvent d’une inspiration religieuse, philosophique, pédagogique. » Ainsi, un rapport de l’Assemblée nationale de 2003 sur les signes religieux à l’école précise : « le caractère propre [de l’établissement] peut s’exprimer dans les activités extérieures au secteur sous contrat [l’enseignement et le respect des programmes] ou bien, à l’intérieur même de ce secteur, par une approche pédagogique différente qui peut tenir compte du caractère confessionnel de l’établissement (article 4 de la loi Debré devenu l’article I 442-5 du Code de l’Éducation nationale) ». C’est ainsi que la loi interdisant le port de signes religieux à l’école ne s’applique pas à l’enseignement privé où tout élève portant un signe ostentatoire de sa religion quelle que soit celle-ci doit être admis dans l’établissement. Dans le cadre d’un projet d’établissement spécifique l’enseignement privé peut organiser des cours d’instruction religieuse pourvu que ceux-ci ne soient pas obligatoires pour les élèves et qu’ils se déroulent en dehors des horaires impartis à l’exécution des programmes scolaires : l’établissement peut ajouter une heure spécifique à l’emploi du temps de l’élève, mais il ne peut pas ôter une heure de mathématiques par exemple pour la remplacer par une heure d’instruction religieuse. Le caractère propre reconnu à l’établissement entraîne à ce que cet établissement ne rend compte que partiellement de ses projets et de ses activités en dehors de celles décrites plus haut, c’est ainsi que lorsqu’un établissement organise une sortie scolaire si l’établissement informe l’autorité académique ce n’est que pour une vérification de la conformité du projet de sortie scolaire  avec  le  projet éducatif national, comme en témoigne la décision de Justice à propos de l’accident du Drac mettant en cause une école privée dont rendait compte le journal £e Monde dans son édition du 17 septembre 1997 : « L'inspectrice d'académie et l'inspectrice de l'éducation nationale, contre qui le procureur avait requis une peine de dix mois avec sursis, ont été relaxées, au motif que le contrôle exercé par l'éducation nationale en matière de classe de découverte “se limitait à la vérification de la conformité du projet aux objectifs éducatifs et pédagogiques”. La directrice de l'école a, elle-même, été mise hors de cause. »

Outre les particularités liées au statut des enseignants et celles liées au fonctionnement pédagogique de l’établissement, un établissement privé peut demander, ce qui est la règle générale, des frais d’inscription aux parents qui sont variables d’une école à l’autre et à l’intérieur d’une même école d’un niveau de scolarité à l’autre. Le fait de devoir payer la scolarité de son enfant entraîne une discrimination alors que dans le public tous les enfants sont admis. Relevons que l’enseignement privé ne fait pas de discrimination entre les enfants quelle que soit leur religion, quelle que soit la position sociale comme lui impose le contrat mais chacun comprendra que suivant le coût de la scolarité certains enfants ne peuvent pas avoir accès à l’école privée. L’argent récolté à partir des frais d’inscription sert bien entendu fonctionnement de l’établissement, une « manne » financière dont ne disposent pas des écoles publiques. Ces dernières ne peuvent pas non plus bénéficier de dons de la part de parents ou d’organismes alors que les écoles privées peuvent en bénéficier.

 

L’ensemble de ses particularités de l’enseignement privé le classe ostensiblement hors de la sphère publique ; seul le contrat dont il faut rappeler qu’il est un contrat d’association, le rapproche du service public d’éducation en tant qu’il en est un auxiliaire. Mais en aucun cas on ne peut affirmer que l’enseignement privé fait partie du service public. Bruno Poucet[13] rappelle l’analyse d’Antoine Prost selon laquelle « qu’avec la loi Debré, l’enseignement privé a changé de fonction. Il cesse ainsi d’être un enseignement de simple défense d’une idéologie particulière pour devenir un enseignement complémentaire de l’enseignement public ayant une fonction de recours, en cas d’échec ».

Ainsi, si l’enseignement privé remplit bien une mission de service public, notamment parce qu’il se conforme aux mêmes règles mises de mise en œuvre des programmes scolaires et que ces enseignants sont des agents de service public, il n’en est pas pour autant une partie du service public pas plus qu’il n’appartient au service public puisque le contrat qui le lie à l’État peut être rompu à tout moment. L’enseignement privé est un auxiliaire du service public.

 

 


[1] Sabine Monchambert, l'enseignement privé France, PUF coll Que-Sais-Je, 1993

[2] Jean-Jacques Latouille de, Les écoles à TULLINS-FURES-FURES et les Lois Jules-Ferry (1601- 1890), L’Harmattan, 2022

[3] Claude Lelièvre, La loi Combes du 7 juillet 1904 interdit l’enseignement aux congrégations, La loi Combes du 7 juillet 1904 interdit l’enseignement aux congrégations – Le blog de Claude Lelievre (educpros.fr)

[4]   Sabine Monchambert, l'enseignement privé France, PUF coll Que-Sais-Je, 1993

[6] Jean-Paul Durand, « Droit français du caractère propre confessionnel. Contribution du droit français et du droit canonique à sa réception par son école privée », L'Année canonique, 2011/1 (Tome LIII), p. 273-281. DOI : 10.3917/cano.053.0273. URL : https://www.cairn.info/revue-l-annee-canonique-2011-1-page-273.htm

[7] Sabine Monchambert, l'enseignement privé France, PUF coll Que-Sais-Je, 1993

[8] Schématiquement, l’Etat ne signera pas de contrat dans un territoire (ville, département, région) où le service public répond totalement à la demande des usagers.

[9] art. L.111-1 du code de l’éducation

[10] art. L.122-1-1 du code de l’éducation

[11] art. L.131-1-1 du code de l’éducation

[12] Jean-Paul Durand, « Droit français du caractère propre confessionnel. Contribution du droit français et du droit canonique à sa réception par son école privée », L'Année canonique, 2011/1 (Tome LIII), p. 273-281. DOI : 10.3917/cano.053.0273. URL : https://www.cairn.info/revue-l-annee-canonique-2011-1-page-273.htm

[13] Bruno Poucet, L'enseignement privé en France au XXe siècle, Carrefours de l'éducation, 2002/1 (n° 13), p. 152-171. DOI : 10.3917/cdle.013.0152. URL : https://www.cairn.info/revue-carrefours-de-l-education-2002-1-page-152.htm

vendredi 4 novembre 2022

Peut-on parler, en France, d’une politique publique d’accueil des enfants handicapés à l’école ?



 L’inclusion scolaire des enfants handicapés ne fait plus débat depuis la loi du 8 juillet 2013 dite loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République qui grave dans le marbre républicain l’inclusion scolaire. L’annexe au texte de loi qui détaille la programmation des moyens et les orientations de la refondation de l’école de la République indique : « Il convient aussi de promouvoir une école inclusive pour scolariser les enfants en situation de handicap et à besoins éducatifs particuliers en milieu ordinaire. »

 Yves Mény et Jean-Claude Thoenig [1] écrivent qu’« une politique publique se présente sous la forme d’un programme d’action gouvernementale dans un secteur de la société ou un espace géographique ». Donc il y a bien une politique publique d’accueil et d’inclusion des enfants handicapés à l’école. Je pourrais dire : mon exposé s’arrête là ; je vous remercie.

 Mais dans la mesure où cette politique publique semble ne pas donner satisfaction aux différents acteurs il faut s’interroger sur la question de savoir d’où vient et comment s’est constitué l’objet de cette politique.

 Pierre Muller écrit « qu’il y a une politique publique parce qu’il y a un problème à résoudre ». Donc comment, en quoi et pourquoi la question de la scolarisation des enfants handicapés se présente depuis 40 ans sous la forme d’un problème qui doit être résolu par une (ou des) politique(s) publique(s) alors qu’auparavant la question semblait ne pas se poser. Muller précise que « la mise en place de ces politiques est liée à une transformation de la perception des problèmes. »

 Un regard sur l’histoire permettrait de voir comment la perception de la scolarisation des enfants handicapés a évolué jusqu’à devenir un problème et se constituer en objet politique pour finir par appeler dans les années 1970 une intervention forte des autorités politiques.

 Je ne retracerai pas cette histoire, nous n’en avons pas le temps. Je m’arrêterai cependant sur le XIXe siècle pour lequel Polyanyi a souligné les effets de « dislocation » que l’industrialisation entraîne sur la société. Il apparaît alors une question sociale que l’État doit prendre en charge et qui amènera l’école de Jules Ferry à s’intéresser d’une façon particulière à ceux qui n’arrivent pas à apprendre et à ceux totalement réfractaires aux apprentissages et aux normes imposées par l’école. On sépara les élèves en deux catégories : ceux qui pouvaient bénéficier des bienfaits de l’école et d’autre part les élèves considérés comme des anormaux d’école. Parmi les anormaux d’école on repérait ceux atteints dans leurs facultés intellectuelles (les idiots, les imbéciles, les arriérés) dont on pensait qu’ils pouvaient tirer bénéfice d’un enseignement spécial dans des classes de perfectionnement annexées à l’école créées en 1910. Les autres ceux qui sont atteints dans leurs facultés morales (les imbéciles moraux, les instables, les pervers, les indisciplinés) étaient pris en charge dans des institutions spécialisées ou dans un asile psychiatrique.

 Les politiques scolaires de cette époque organisent les ruptures entre types d’enfants et entre types d’institutions. Ainsi, les politiques publiques constituent le problème de la prise en charge des enfants handicapés en termes de secteurs d’intervention où chaque secteur érige ses propres objectifs comme à propos de qualification des personnels en demandant la création d’un diplôme d’état d’éducateurs spécialisé (1967). Les lois de 1975 et de 2005 ne supprimeront pas la sectorisation apparue au XIXe siècle et cela malgré la montée en puissance du courant de pensée initié par un psychiatre américain qui prône la désinstitutionalisation des lieux de soins[2]. Cette sectorisation est aussi confirmée dans la loi de refondation de l’école de 2013 où l’article 7 mentionne la possibilité de coopération entre école et établissements spécialisés.

 On observe donc que l’État a du mal à sortir de la sectorisation créée au XIXe siècle. Pire, la loi de 2005 amplifie la sectorisation en faisant entrer dans le dispositif les professionnels libéraux ce qui ne facilite pas les coordinations autour d’un projet pour l’enfant (élève), et qui a eu comme effet d’accroître le sentiment de non-reconnaissance chez les professionnels des établissements médico-éducatifs et médico-sociaux.

 En rester sur cette observation négative ce serait oublier que l’objet d’une politique publique consiste à modifier l’environnement des acteurs concernés, la perception qu’ils peuvent en avoir et donc leurs conduites sociales. Pierre Muller ajoute que « prendre une décision, c’est déjà mettre en œuvre une politique, dans la mesure où les différents acteurs (partenaires sociaux, citoyens, autres ministères) vont probablement modifier leurs conduites en fonction de cette décision. » Si nous nous référons à la grille d’analyse des politiques publiques de Charles Jones nous interrogerons la loi sous l’éclairage de la 1re étape qu’il décrit : « l’identification du problème qui est la phase où le problème est intégré dans le travail gouvernemental ».

 Dans cette phase d’identification du problème sont associés un ensemble de processus. Comment l’État a associé les processus de perception du problème par les différents acteurs, donc comment a-t-il défini le problème, a-t-il agrégé les différents problèmes secondaires, comment a-t-il pris en compte les incidences sur l’organisation de structures, a-t-il tenu compte de la représentation des intérêts des différentes parties prenantes ?

 Cette phase d’identification du problème permet de définir l’agenda politique qui constitue et qui regroupe l’ensemble des processus par lesquels les décideurs s’emparent d’une question pour construire un programme d’action. Cette phase a‑t‑elle vraiment eu lieu ?

 Peut-être, comme l’écrit Pierre Muller au lieu de concevoir cette politique publique par une série de séquences successives, eut-il été préférable de la bâtir comme un ensemble de séquences parallèles interagissant les unes par rapport aux autres et se modifiant continuellement. En somme et synthétiquement au lieu d’empiler lois et règlements peut-être eut‑il été mieux et plus efficace d’envisager une loi-cadre dans un programme pluriannuel.

 C’est ce que dit le CESE (juin 2020) qui préconise de renforcer le travail collaboratif et la mutualisation des missions entre les établissements scolaires et les établissements et services médico-sociaux (ESMS) pour faire progresser l'inclusion scolaire, la socialisation et l'autonomie des jeunes en situation de handicap. Il s'agit notamment de décloisonner ces deux secteurs par la création de parcours mixtes, de mobiliser davantage l'expertise des professionnels et professionnelles des ESMS, dont la nécessité et les moyens doivent être confortés, au sein des établissements scolaires… » Il aurait donc fallu travailler à une réforme, en parallèle et concomitamment, du secteur scolaire et des secteurs de soins (psychiatrie) et des établissements médico-éducatifs et médico-sociaux.

 

 

 

 



[1] Yves Mény et Jean-Claude Thoenig, politiques publiques, Paris, Puf, 1989

[2] à la suite des travaux du sociologue Erving Goffman qui montraient le caractère totalitaire du fonctionnement quotidien de certaines institutions hospitalières qui imposent leurs propres rythmes et circuits à des individus vingt-quatre heures sur vingt-quatre au mépris des droits individuels.

L’Université de Valence en Dauphiné et Jean de Montluc, (Évêque de Valence, pédagogue ou politique, calviniste ou diplomate ?

 


 

Dire qui était Jean de Montluc et analyser la façon dont il conçut sa mission d'évêque de Valence en Dauphiné, en même temps que nous regardons son action par rapport à l’université de cette ville, au moment où croissent la pensée protestante et l'implantation de la Réforme, nous semble devoir concourir à mieux comprendre comment à cette époque une université était indissociable du contexte sociopolitique de la ville qui l’accueillait.

Le rôle de Jean de Montluc prend bien sa place dans l’interrogation que nous pouvons avoir du lien entre l’université de Valence et l’émergence de la Réforme à Valence. Ce rôle et l'action de Jean de Montluc se situent bien dans la provocation évoquée par la confrontation de deux mots de la question suivante : était-il calviniste convaincu ou fin diplomate ?

De lui Brantôme écrivait : « On le tenait luthérien au commencement et puis calviniste ; mais il se comportait par belle mine et beau semblant ». Cette remarque trouve son origine à la fois dans les études que Jean de Montluc suivit, les rencontres qu'il fit, le discours qu'il tint et les attitudes bienveillantes dont il fit preuve à l'égard des tenants de la Réforme.

 

   Ces études se passèrent tout d'abord à l'abbaye de Condom où officiait le célèbre évêque Jean Marre réputé comme humaniste et réformiste ; ne fit-il pas venir en 1517 Jacques Almain théologien nominaliste et gallican ? Pour lui succéder il appela Jacques Lefèvre d'Étaples qui se désista. On voit comment Jean de Montluc rencontra « la pensée réformatrice et humaniste ». Il fut remarqué pour ses dons intellectuels, ce qui convainquit Jean Marre de l'envoyer étudier à l'université de Toulouse le droit civil et le droit canonique. Ses historiographes pensent, sans certitude, qu'il fréquenta aussi la faculté de théologie tenue par les Dominicains. De la même façon il n'existe aucune certitude qu'il assistât aux lectures des textes de Lefèvre d'Étaples faites dans un cercle d'étudiants animé par son professeur de droit, Jean de Boysonné. Durant l'hiver 1532 -1533 il quitta définitivement l'abbaye de Condom, au moment où Marguerite de Navarre passait dans la ville. La rencontra-t-il ? L'histoire n'en dit rien. Cependant on sait qu'il assista au carême commandé à Gérard Roussel par Marguerite de Navarre, et, semble-t-il, Jean de Montluc se serait rapproché d'elle. À tel point que Brantôme écrivit qu'elle le défroqua. Ce fut le début d'une longue carrière diplomatique, marquée entre autres par un séjour à Rome en 1535 durant lequel il enseigna la théologie au collège Sapienza, bien que le pape le soupçonnât d'être acquis aux idées luthériennes. Le 18 août 1553 le roi lui accorde le diocèse de Valence et de Die. Un diocèse où les idées hérétiques étaient déjà bien installées comme le rappelle Michel Devert (p77) : « A la mort de Jacques de Tournon, l'évêché de Valence et de Die était donc bien contaminé par l'hérésie ; ses adeptes semblaient bien résolus à propager leurs croyances. Si un évêque bien résolu ne venait lui faire échec, elle risquait de s'étendre à tout le diocèse ».

 

    C'est donc dans ce climat que Jean de Montluc arrive physiquement à Valence en 1555. Dès l'année précédente il déclarait sa résolution à prendre en charge la destinée de l'université de la ville. Dans une lettre aux consuls, François Joubert, professeur, écrivait : « Elle (l'université) est, m'a-t-il déclaré, la plus belle rose que les Valentinois aient à leur chapeau et qu'il aura moyen, comme il l'espère, faire tant que Monsieur Arnaud Ferrier conseiller du roi au parlement de Paris, l'un des premiers hommes de notre temps, pourra venir à Valence, lire et régenter pendant six mois qu'il a de vacations. Pour les autres six mois, il moyennera le semblable de Monsieur Coréas, conseiller du roi au parlement de Toulouse. D'avantage il aura moyen d'y faire venir Monsieur Govéa, homme de grand bruit et savoir pour continuer l'année ». Dès lors il est indubitable qu'il mit tout en œuvre pour favoriser le développement et la prospérité de l'université de Valence, allant jusqu’à offrir de l’argent pour que Cujas. Là où nous devons interroger son histoire, c'est dans le choix qu'il fit de certains professeurs qu'il attira à Valence, comme Bourg en 1556 ou Hotman en 1563, tous deux étaient réputés favorables aux idées hérétiques, le premier fut condamné à mort.

    Là s'installent à la fois le doute et le paradoxe : Jean de Montluc soutenait la candidature de professeurs "hérétiques" en même temps qu'il s'opposait, en vain, à la venue de Loriol connu comme calviniste. Négligeait-il de voir les agissements des hérétiques en même temps qu'il rédige « les instructions chrétiennes de l'évêque de Valence » où il écrit : « notre religion est par les hérétiques déchirée, et peu sans faut délaissée par ceux qui la dussent maintenir… Celles (les brebis) qui sont au vrai troupeau sont en continuel danger d'être séduites et diverties du bon chemin ». Quoi de plus conforme à l'orthodoxie. Cependant l'évêque portait la barbe, prêchait sans habits sacerdotaux, se couvrait le chef du bonnet semblable… ceux des réformés. Au-delà de cela, ses sermons heurtèrent la Sorbonne qui eut à en connaître, et qui les déclara hérétiques. L'œuvre de Jean de Montluc à Valence au sein de l'université et en direction de ses diocésains fut sans doute tout empreinte d'un grand désir d'éducation, d'une éducation sans doute plus humaniste qu'hétérodoxe mais qui s'opposait aux privilèges du clergé local, notamment du chapitre cathédral. Cependant, notons qu’accusé par le doyen du chapitre d'être hérétique, il obtint réparation de la condamnation. Il fut quand même excommunié en 1563 mais la promulgation n'en fut jamais faite. Il est vrai qu'il était un des principaux conseillers de Catherine de Médicis.

     Nous suivrons facilement Michel Devert lorsqu'il écrit qu'il est difficile de porter un jugement sur la personnalité religieuse de Jean de Montluc. Sans doute était-il un humaniste qui sans aller jusqu'à adhérer aux idées de la religion réformée, se trouvait bien à côtoyer les critiques de la corruption de l'Église, le retour aux textes fondateurs, et l'idée que l'homme peut participer à la compréhension du monde ; il croyait en l’Homme. Ne fut-il pas de ces évêques qui condamnèrent l’astrologie comme l’indique Marc Venard : « et nombre d’évêques, d’un bout à l’autre du siècle, condamnent l’astrologie divinatrice, tel Jean de Montluc, évêque de Valence en 1558, qui contre les clients des astrologues, leur rappelle : que nous sommes, nous et nos biens, sous le pouvoir de Dieu, et que toutes choses sont faites, mues et gérées par sa libre volonté. ». Sans doute aussi, comme l’écrit Marc Venard, Jean de Montluc « comme d’autres prélats, plus politiques, voient surtout dans le protestantisme un remède à des abus invétérés et une position d’indépendance vis-à-vis de Rome. » C'est dans ce cadre de pensée qu'il fonda ou qu'il soutint la fondation (il subsiste un flou dans la connaissance historique) d'un collège en 1564. À ce propos l'abbé Nadal souligne la décadence de l'enseignement de la théologie à Valence où entre 1560 et 1575 il n'y eut que deux promotions d'étudiants en théologie contre plus de trois cents en droit, et d'écrire : « Montluc s'étant aperçu du préjudice que causait à la religion la décadence de l'enseignement de la théologie, il forma un dessein qui honore sa mémoire… Il résolut de confier aux jésuites l'éducation de la jeunesse de sa ville épiscopale ».

 

     Nous conclurons, provisoirement, par une citation extraite de la thèse (1893) de Hector Reynaud : « Ce qui frappe tout d'abord chez lui, c'est l'estime qu'il professe pour les lettres, le soin qu'il prend pour les mettre en honneur parmi ses diocésains. Il favorisa de tout son pouvoir l'enseignement public à Valence et inaugura, pour l'université de cette ville, une ère de prospérité ».

      C'est ainsi, dans cette œuvre éducative, qu'il écrivit en 1461 dans « familières explications des articles de la foi » : « ployons notre esprit et l'assujettissons à consentir et à croire tout ce que le Saint-Esprit nous a révélé dans les Écritures ».

 

 

 

 


mardi 13 septembre 2022

Les écoles à TULLINS-FURES et les Lois Jules Ferry (1601- 1890)

 

Comment les lois scolaires de 1881 et 1882 dites Lois Jules Ferry, se sont-elles imposées malgré la querelle autour de la laïcisation de l’enseignement et des instituteurs ?

À partir de l’exemple de l’histoire des écoles de Tullins-Fures, petite ville de l’Isère, ce livre montre la façon dont ces lois scolaires ont été perçues par les édiles locaux, l’engouement manifesté pour les mettre en œuvre. Cela permet de mesurer combien elles sont l’aboutissement d’un long processus d’évolution de la société et du rapport à l’éducation.

 

 Jean-Jacques LATOUILLE, ancien archiviste communal à Tullins-Fures, inspecteur de l’Éducation nationale honoraire, docteur en sciences de l’éducation, est l’auteur de plusieurs livres ayant trait à l’histoire de l’Isère sous le pseudonyme Jean-Jacques de Corcelles. Il est l’auteur d’une Histoire de l’université de Valence et a écrit avec Robert Mazin une histoire de Tullins-Fures.



lien de l'Editeur :

LES ÉCOLES À TULLINS-FURES ET LES LOIS JULES FERRY (1601-1890), Jean-Jacques LATOUILLE - livre, ebook, epub - idée lecture (editions-harmattan.fr)

samedi 22 janvier 2022

Ecole et handicap : merci Monsieur Zemmour ?

 


Que l’on ne se méprenne pas, et c’est tout le sens du point d’interrogation du titre, je pense avec force et vigueur que les propos de M. Zemmour sont indignes, innommables et émanent d’une philosophie rétrograde. Toutefois, il faudrait s’interroger sur pourquoi nous entendons ces propos comme plus indignes que ceux qui désignent les réfractaires à la vaccination comme devant perdre leur statut de citoyen...

Cependant les propos d’E. Zemmour ont eu pour effet de mettre le handicap en lumière dans le débat politique du moment. Cependant la lumière fut faible et bien vite elle s’est éteinte. Chacun est reparti vers ses occupations électorales, fier d’avoir caqueté avec le troupeau mais de volonté d’agir il n’y eut pas faute de vouloir analyser la situation de l’inclusion scolaire. Or la France est très loin d’appliquer les prescriptions qu’elle s’est imposées par les lois de 1975 dite d'orientation en faveur des personnes handicapées et de 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Combien d’écoles, de collèges et de lycées sont accessibles ? Combien de moyens de transport en commun sont accessibles ? Combien de trottoirs, aujourd’hui envahies par les terrasses des cafés et des restaurants, sont accessibles ? Chacun se gargarise de bonnes paroles, même pas de bonnes intentions. Je ne décrirai pas ici les situations où la loi n’est pas appliquée quand elle n’est pas tout simplement contournée voire annihilée par une nouvelle réglementation comme la loi de 2013 qui mit un coup d’arrêt à l’obligation de mise aux normes d’accessibilité voulues par la loi de 2005, que dire de la conjugalisation de l’allocation adulte handicapé.

À y regarder de près l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap est bien devenue une obsession, un objet hors sol dont on ne doit pas discuter ; car à part E. Zemmour qui, dans notre pays si prompt à se recommander de la philosophie des Lumières, oserait le moindre propos qui pourrait laisser à penser à une mise à distance de la notion d’inclusion. Alors il faut « inclure » et on inclut sans se préoccuper de l’organisation matérielle : on inclut à l’école mais les locaux ne sont pas accessibles, et il n’y a pas de personnel qualifié...

Depuis 1975 l’école a reçu, avec des piqures de rappel régulières, l’injonction d’abord d’intégrer puis aujourd’hui d’inclure les élèves en situation de handicap sans se préoccuper des leçons de l’histoire de la prise en charge des élèves handicapés. Cette histoire, commencée dans les années 1960, est marquée dans un premier temps par la volonté des parents et de quelques professionnels du secteur médico-éducatif de sortir ces enfants des établissements désignés comme étant des lieux d’enferment social, on a alors transformé une partie des places d’internat en places d’externat où les enfants devenus externes continuaient à être accueillis. Puis il y eut les premières expériences d’externalisation de classes d’établissements. L’Éducation nationale s’est tenue à l’écart de cette évolution jusqu’à la loi de 1975 qui prenait à son compte ce mouvement et avait prévu l’accompagnement de ce transfert vers les écoles « ordinaires » notamment en créant des services, à partir du personnel des établissements « libérés » par la fermeture des places d’internat, qui avaient pour mission d’accompagner les enfants dans leur insertion dans les écoles ordinaires et de leur apporter l’équivalent de services et de soins dont ils bénéficiaient dans les établissements.

Aujourd’hui, ces services ont vu, comme tous les établissements du ministère de la santé, leurs capacités de prise en charge considérablement diminuer et n’ont plus la capacité d’apporter une aide efficace aux enseignants qui, en plus de ne pas être formés, se retrouvent isolés dans leur classe. Parfois, l’élève bénéficie d’un accompagnement par un accompagnant d'élèves en situation de handicap (AESH) contractuel sous statut précaire et avec un ersatz de formation là où dans les établissements il y avait des enseignants spécialisés, des éducateurs spécialisés, du personnel paramédical... Qu’est-ce que les élèves en situation de handicap ont réellement gagné dans ce transfert ? Les parents qui voient la scolarité de leur enfant, dans le système actuel, remise en cause chaque année, qu’ont-ils gagné, eux qui sont quotidiennement tellement mis émotionnellement à contribution ?

 L’inclusion scolaire pour laquelle nous nous sommes battus, consiste aujourd’hui à accueillir coûte que coûte mais sans que ça coûte ces enfants dans les écoles ordinaires, peu importe la qualité du service rendu à l’enfant et à sa famille. Non, l’inclusion scolaire conduite par le ministère de l’Éducation nationale n’est pas vraiment une réussite, tout au plus est-elle une obsession maniaque comme souvent il y en a dans l’Administration, marquée par le principe de « quantité » plus que par celui de « qualité ».

mercredi 22 décembre 2021

Le concept de territoire est-il pertinent pour gérer le système éducatif français ?

 




Communication présentée le 7 décembre 2021 au séminaire de recherche du Centre International de Management Public, IPAG-Université de Poitiers.

  

L’usage du mot territoire rappelle la phrase du Président de la République Charles de Gaulle (1965) : « On peut sauter sur sa chaise comme un cabri et dire l’Europe, l’Europe, et ça n’aboutit à rien et ça ne signifie rien. » Ainsi, aujourd’hui face à l’avalanche d’utilisation du mot on peut dire « territoire, territoire... et ça ne change rien, et on ne sait pas très bien ce que ça signifie... ». Le mot territoire est un mot très utilisé dans les discours de concepteurs et de gestionnaires des politiques publiques : Paris et les territoires, les territoires d’exclusion, les territoires perdus de la République. La France dispose d’une Banque des territoires et d’un ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales.

Les sciences sociales ne sont pas avares en matière d’utilisation du mot territoire auquel on a souvent recours pour décrire « scientifiquement » des politiques publiques ou pour leur donner de la consistance comme le montre le sociologue Michel Billé dans un article paru dans la revue de l’association CMT-France où il parlait de l’inclusion : «  inclusion sur un territoire... », «  Un territoire inclusif... », «  Conformément au projet de territoire... », «  le parcours du patient sur un territoire de santé » qu'il faut apprendre à distinguer du «  territoire de soin »...

L’Éducation nationale n’échappe pas à ce concert : Territoires Numériques Éducatifs, Territoires éducatifs ruraux, ou comme l’écrivait la revue citée plus haut : « La circonscription d’IEN pour laquelle la notion de territoire sera capitale pour les années à venir... » Pour autant une circonscription d’inspecteur est-elle un territoire ? Malgré tout, à l’Éducation nationale on persiste et on signe pour que le « territoire » soit pris en compte dans la gestion du système éducatif ; ainsi la revue Éducation et Formation (revue éditée par le ministère) propose un numéro intitulé : « Les territoires de l’éducation : des approches nouvelles, des enjeux renouvelés. », dans lequel on peut lire que « La connaissance des territoires est indispensable à la compréhension des politiques éducatives et de leurs résultats ainsi qu’à la mise en œuvre de ces politiques dans les territoires ». Dans la même veine Jean-Michel Blanquer, actuel ministre de l’Éducation nationale, dans son livre « l’École de demain » (2016) écrit parmi ses propositions de réforme du système éducatif qu’il faut « Favoriser l'expérimentation dans les territoires où les besoins sont les plus forts [...] Faire émerger des circonscriptions de l'école obligatoire, c'est à dire des circonscriptions d'IEN ou des bassins pour dépasser la coupure école/collège... »

Nous pouvons, comme Michel Cattla, nous demander si « territoire » ne serait pas un de ces mots vertueux, comme projet, réseau, développement durable, qu’on met et qu’on trouve un peu partout sans qu’on puisse d’emblée leur attribuer une définition stricte et qu’apparaisse un sens éclatant. D’ailleurs Michel Billé termine sa liste par ces mots : « sans qu’on vous explique ce qu’est un territoire » ; de la même façon le syndicat des inspecteurs questionne à propos de la distinction et des différences de fonctionnement entre les deux corps d’inspection (1er et 2nd degrés) : « Ces deux difficultés résultent d'une incapacité persistante à imaginer le territoire autrement que comme une entité géographique stable au sein de laquelle se répartissent des écoles et des établissements de diverses natures. Nous avons insisté à de nombreuses reprises pour réclamer que le territoire soit défini par le projet qui fédère ces structures plutôt que par la catégorie administrative de ces dernières. »

 

Finalement : qu’est-ce qui rend si difficile la conception d’une définition de « territoire », et qu’est-ce qui fait un « territoire » ?

 

Yves Jean introduit les actes du colloque « Lire les territoires[1] » par un article intitulé : « La notion de territoire : entre polysémie, analyses critiques et intérêts ». De l’analyse de cette polysémie on retire que l’appropriation du mot et de la notion de « territoire » par le langage commun, c’est à dire par les acteurs locaux, est sans doute le résultat d’un long processus social complexe qui marque au début des années 1980, amplifié depuis les années 1990, le « retour de l’acteur », le « retour du sujet » en réaction à un contexte économique et idéologique caractérisé par la mondialisation et une déterritorialisation accentuée de la production. Dans ce contexte social et économique émerge alors une « volonté individuelle d’ancrage, d’identité, d’un besoin de territoire, d’être de quelque part ». À partir de là se constitue une nouvelle forme de citoyenneté localisée qui oblige à séparer l’appartenance sociale et l’appartenance citoyenne afin de privilégier l’individu. On peut alors relever que cette reconquête par l’acteur du local, ou par le local de l’acteur, se fait sur la base d’une vision globale au niveau local qui prend en compte les interactions complexes entre l’économique, le social, le culturel et l’environnemental et qui pose la question de la tension entre l’affirmation des ancrages locaux et l’universalisme.

 

C’est dans cette tension entre des ancrages locaux et « l’universalisme » qu’il faut regarder la gestion du système éducatif dans la mesure où la notion de territoire est à la fois juridique, sociale, culturelle et sans nul doute affective.  L’affectivité liée à la notion de territoire prend corps dans le fait que le territoire c’est l’espace de référence pour savoir ce qu’on y fait, comment on s’y protège, ce que l’on va y faire, et ce qu’on deviendra. Donc dans le rapport de l’individu au territoire il y a avant tout une question d’appropriation : de l’espace, du temps, des interrelations humaines à travers des réseaux, de la relation espace/société..., marquées par des questions de mobilité (sociales mais surtout physiques quotidiennes) et par le poids de l’individualisme ou de l’atomisation de la société.

 

Ainsi le territoire (différent de la carte) est un espace identifié autour d’une construction sociale. On retrouve cette idée de construction sociale chez la sociologue Agnès van Zanten qui écrit[2] à propos de l’école des « quartiers » qu’il ne faut pas voir l’espace local comme une donnée, « Il s'agit au contraire de mettre l'accent sur cet espace comme une construction sociale dotée d'une certaine cohésion interne et d'une autonomie relative par rapport au centre mais, en même temps, structurellement articulé à celui-ci par des rapports de domination et de dépendance. » Outre l’idée de construction sociale il faut retenir la question, donc la possible tension, autour de l’“autonomie relative par rapport au centre” qui n’est pas sans rappeler la tension entre l’affirmation des ancrages locaux et l’universalisme. Cet accrochage au centre, sans doute inévitable, rappelle que le territoire est aussi un espace d'organisation politique[3], et en tant qu'il est un espace d'organisation politique de la société le territoire intéresse particulièrement la gestion du système scolaire car celui-ci est une des formes de l’action publique qui organise la vie sociale.

 

Si comme André Micoud nous pensons le territoire comme étant le résultat de la construction sociale, politique et pour finir institutionnelle, par laquelle un pouvoir s'autorise et s'insinue pour la résolution d'un problème, l'École ne peut pas faire l’économie de la réflexion et de la gestion des territoires, notamment si elle est une réponse à une demande sociale. L’hypothèse, dans le contexte actuel, est donc que la gestion de l'action publique devrait reposer sur une différenciation des territoires et des populations au-delà du processus de décentralisation/déconcentration, et poser la question de la tension entre l’affirmation des ancrages locaux et l’universalisme ; notamment pour l’École qui, plus que tout autre territoire, est au cœur de cette tension car elle est la création d'un espace de référence pour savoir ce qu'on y fait, comment on s'y protège, ce que l'on va y faire, ce que l'on deviendra. Or il apparaît que ces questions : l’ancrage local des acteurs et la relation local-centre, ne sont apparemment jamais posées en amont de la construction des découpages administratifs ni des projets de politiques publiques. Notamment on ne prend pas en compte les mobilités, les conditions et le fonctionnement des interrelations humaines... La gestion du système éducatif doit s'intéresser à la territorialisation comme étant la façon dont les usagers s'approprient les espaces et en font un territoire c'est à dire un lieu de réponse à leur demande et de traitement de leurs problèmes, sans négliger une réflexion sur les modes de production et de défense de ce territoire.

Dire cela c’est dire que le concept de territoire est pertinent pour gérer le système éducatif à quelques conditions : revoir la décentralisation et la déconcentration, poser (et résoudre) la question de l’autonomie des structures locales, simplifier l’intervention du « centre » qui d’organisateur doit devenir plus animateur et sans doute réduire voire supprimer des structures « locales » : rectorat, DASEN... qui loin d’être des acteurs qui impulsent ne sont que des courroies de transmission entre le centre et le local (histoire des poupées russes pour le projet d’établissement) renforçant ainsi le pouvoir du centre et figeant la tension entre l’affirmation des ancrages locaux et l’universalisme.

 

Jean-Jacques LATOUILLE[4]

Inspecteur de l’Éducation nationale honoraire

Ancien conseiller du ministre de l’Éducation nationale du Gabon

Membre de l’Ordre Mondial des Experts Internationaux

 



[1] Yves Jean et Christian Calenge (dir.), Lire les territoires, Presses universitaires François-Rabelais Tours, 2002 ; Publication sur Open Edition Books, 2013.

[2] Van Zanten A., L’école de la périphérie, PUF, Paris, 2001.

[3] Ce qui a trait à la vie collective dans un groupe d'hommes organisé.

[4] Latouille J.J., "Place du concept de territoire dans la formation des cadres intermédiaires" dans territoires éducatifs et gouvernance, SCEREN et Presses Universitaires Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, 2003.

Guide Complet sur le Harcèlement en Ligne Destiné aux Parents

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