dimanche 13 décembre 2020

Maître « G » et professionnalité

 


Ce texte est l’introduction à un stage intitulé « Le maître ‘’G’’ et les apprentissages scolaires » que j’avais organisé du 22 au 26 janvier 2001 alors que j’étais Inspecteur de l’Éducation nationale chargée d’une circonscription AIS (adaptation et intégration scolaire, aujourd’hui on dit ASH).

Cette semaine fait suite à un stage tenu en mars 2000 dont l’objectif était de poser des éléments de réflexion sur le rôle des maîtres G ; en janvier 2001 l’objectif du stage visait à la création d’outils pour la prévention, la prise en charge et l’orientation des élèves, la relation avec les partenaires. Il était attendu des stagiaires qu’ils rédigent un document de synthèse susceptible d’être diffusé dans le département.

  

Dans la mouvance des remarques, des réflexions et des critiques faites autour des Maîtres G, ceux qui au sein de l’école sont chargés de prises en charges à dominante rééducative en faveur des élèves en grande difficulté scolaire, il m’est apparu indispensable que soit définie la « professionnalité » de ces personnels.

Celle-ci devrait l’être par le référentiel de compétences conséquent de celui de la formation et de l’examen pour l’obtention du CAPSAIS. Il semble, à l’expérience, que cela ne suffise pas. La question représentative de l’obstacle à l’acceptation d’une professionnalité du maître G par les autres membres de l’institution scolaire, se constitue autour de la place du maître G par rapport aux autres professionnels : enseignants, bien sûr, mais aussi « soignants » (orthophonistes, psychomotriciens, psychothérapeutes…) ; ainsi il n’est pas rare d’entendre dire des maîtres G qu’ils pratiquent des ‘’sous-thérapies’’ ou une psychanalyse édulcorée. Peut-être devrions‑nous aussi nous interroger sur le sens du mot « rééducation » qui introduit une ambiguïté sur les fonctions du maître G : rééduquer c’est refaire l’éducation. Or dans le cas des enfants qui nous sont présentés, s’agit-il de refaire une éducation qui aurait été mal conduite ou plus simplement de mettre en place une éducation ? Je suis de ceux qui pensent que le recours à un néologisme autour du préfixe ortho eût été plus pertinent. Mais là ne sont pas le débat ni l’objectif des stages proposés.

 Pour nous il s’agit de cerner ce que sont la place et la fonction du maître G dans l’institution scolaire, en faveur de quels élèves il agit et dans quels rapports avec d’autres professionnels.

 Le stage de mars 2000 nous a permis de dresser un tableau sommaire de ce que j’entends par professionnalité et que je rappelle dans le paragraphe suivant, puis de définir à quels enfants s’adresse le maître G et avec quels « moyens ». Ce second stage doit nous permettre de mutualiser vos outils et d’élaborer des outils communs, notamment des outils d’analyse nécessaires à la compréhension de la fonction du maître G dans l’institution scolaire.

 La professionnalité et l’identité : 

La question essentielle et centrale qui est posée, est celle de savoir ce qu’est un maître G :  qu’attend-on de lui ? Donc qu’elle est sa fonction au sein de l’institution scolaire sachant qu’on définit une fonction lorsqu’il existe une relation entre deux ou plusieurs termes. Ainsi, pour Merton il existe des fonctions manifestes et explicites, et des fonctions latentes : parfois masquées ou difficilement reconnues par le corps social : ne serait-ce pas ce qui se passe pour le maître G ? 


                               

Ce que nous allons chercher à observer et à rendre ‘’audible’’ par nos partenaires c’est ce qui se passe le long des flèches et qui pourrait être imagé par la question : comment le maître G répond-il aux questions qui lui sont posées ?

 En règle générale la façon de répondre définit un cadre professionnel ou pour le moins s’inscrit dans un cadre professionnel prédéfinit par l’institution. Est-ce ce qui se passe pour le maître G ?

 Ce cadre professionnel définit la profession ou (sociologiquement) l’emploi qui est instituée, reconnue juridiquement et enregistrée officiellement, ce qui entraîne des      rites sociaux de passage et des rites d’autojustification. Il se constitue alors une organisation en groupe disposant du pouvoir souvent exclusif d’exercer une activité socialement valorisée, de la réglementer et d’en contrôler l’accès.

 Dans le cas des maîtres G, sommes-nous dans ce cas de figure alors qu’ils ne sont reconnus par l’institution que comme instituteurs (ou professeurs des écoles) spécialisés, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent être vus et reconnus qu’à l’instar des autres avec, certes, un ‘’petit plus’’ constitué par le CAPSAIS ?                                                                            

Revenons à notre propos initial pour rappeler qu’une profession est une occupation qui est parvenue peu à peu à mettre en place les conditions de son institutionnalisation ce que les définitions de Weber et Parsons permettent d’appréhender. Pour Weber la professionnalisation est le passage d’un ordre social traditionnel à un ordre social où le statut de chacun dépend des tâches qu’il accomplit et où l’allocation des emplois s’effectue selon des critères rationnels de compétence et de spécialisation ; quant Parsons, il présente 4 critères de professionnalisation :

-          Prédominance de la technologie et recours à la science appliquée,

-          Autorité fondée sur la détention d’un secteur particulier du savoir et de la pratique,

-          Relation avec la clientèle orientée vers l’universalisme,

-          Poursuite du succès, réussite institutionnellement valorisée, acquisition des différents symboles de reconnaissance. 

Nous pouvons donc voir que formation et cadre réglementaire ne suffisent pas à définir et surtout à stabiliser une profession. Pour qu’une profession s’institue il faut qu’existe une professionnalité que je situe dans l’espace entre les tâches accomplies et l’emploi défini par des critères rationnels de compétence et de spécialisation, ce qui est le cadre réglementaire de fonctionnement et de formation. La professionnalité permettrait de répondre à la question : « comment est-ce que je réponds aux questions qui me sont posées dans le cadre qui m’est imposé ? ». Pour cela il faut connaître le cadre, connaître les questions qui sont posées au professionnel, se démarquer par rapport à d’autres professionnels.

 En somme : qu’est-ce qui fonde ma différence et ma spécificité ?

 Je crois fortement en la nécessité des maîtres G mais avec une autre formation (initiale et continue), un autre cadre de travail, une autre définition du travail et une véritable typologie des tâches : le maître G n’est plus un enseignant même s’il doit avoir le souci de la réussite scolaire de l’enfant et du lien avec les apprentissages. Se pose-t-on la question pour les médecins scolaires et les psychologues scolaires ?

 


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